Le Nouveau Narratif : Pour un Réveil de la Conscience Haïtienne
- Joel Agoudou
- 6 oct.
- 3 min de lecture
Par Joël AGOUDOU, Journaliste
Dans l’histoire tourmentée d’Haïti, rares sont les périodes où la nation s’est interrogée sur sa propre image avec autant d’urgence qu’aujourd’hui. Jadis, notre fierté puisait sa force dans la splendeur de nos plages, la majesté de nos sites historiques et la dignité d’un peuple qui avait su enseigner au monde la plus noble des leçons : celle de la liberté. À travers les écrits, les récits et la mémoire collective, Haïti rayonnait d’une lumière morale qui inspirait respect et admiration.

Mais, plus de trois décennies après la chute du duvaliérisme, ce reflet s’est assombri. Nos valeurs se sont effritées, emportées par l’instabilité politique, la fracture sociale et le désenchantement collectif. L’Haïtien, autrefois fier de son appartenance, semble aujourd’hui étranger à son propre pays. Dans les discours, sur les réseaux, dans les conversations de l’exil, Haïti est souvent évoquée avec amertume parfois même avec dérision. Le négatif s’est imposé comme le seul récit possible.
Ce miroir déformant, nourri par des images de violence et de misère, a fait fuir les visiteurs et terni l’héritage d’une terre pourtant bénie. Le tourisme, jadis moteur de prestige et de rencontre, s’est éteint dans l’indifférence. Les dirigeants successifs ont souvent tenté, sans succès durable, de redorer le blason national. Sous la présidence de Michel Joseph Martelly, la ministre du Tourisme de l’époque, Stéphanie Balmir Villedrouin, avait amorcé une relance. Mais faute d’un ancrage culturel solide, cette tentative s’est effacée, comme un feu de paille, dans le tumulte d’une gouvernance contestée.
Aujourd’hui, une autre voix s’élève : celle du ministre du Tourisme John Herric DESSOURCES, qui, au début de l’année 2025, a lancé le “Nouveau Deal” un appel vibrant à un sursaut collectif. Ce projet n’est pas qu’une campagne de communication : c’est une philosophie, un contrat moral entre Haïtiens. Il invite chacun à devenir le porte-parole d’un récit renouvelé , un récit de dignité, d’espoir et de reconstruction.

Car la vérité est simple : la crise sécuritaire, si dramatique soit-elle, ne représente pas toute Haïti. Sur les douze régions du pays, seules quelques-unes sont directement touchées par la violence armée. Faut-il pour autant condamner les neuf autres au silence, les priver du droit de briller ? Faut-il continuer à n’exister, aux yeux du monde, qu’à travers la peur et la souffrance ?
Le Nouveau Narratif, c’est cette rupture nécessaire avec la résignation. C’est le refus du fatalisme médiatique. C’est l’appel à raconter autrement Haïti par ses couleurs, ses traditions, sa créativité, ses paysages et la grandeur tranquille de son peuple. Tous les pays connaissent leurs ombres, mais rares sont ceux qui les exposent avec autant d’ardeur que nous. Il est temps d’apprendre à vendre Haïti à sa juste valeur non pas en travestissant la réalité, mais en rééquilibrant le regard.
Dans le monde numérique d’aujourd’hui, chaque publication, chaque image, chaque mot devient un ambassadeur. Nos partages collectifs façonnent l’imaginaire mondial sur notre pays. Alors, pourquoi ne pas choisir la fierté plutôt que la honte, la beauté plutôt que la peur ?
À Reflet, nous saluons cette démarche comme une étape décisive vers un nouvel éveil de conscience nationale. Oui, le changement commence d’abord par la parole , par ce que nous disons de nous-mêmes, par la façon dont nous choisissons de nommer notre douleur et de magnifier notre espérance.
Le Nouveau Narratif n’est pas une illusion : c’est un devoir moral.
Il est temps, enfin, de faire renaître Haïti dans le regard des Haïtiens eux-mêmes.







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