"Le con reçu par un ancien colon à l’Élysée : coopération vs humiliation ?"

ANALYSE

La récente déclaration du président français Emmanuel Macron, qualifiant les dirigeants haïtiens de "cons", a provoqué une onde de choc au sein de la communauté haïtienne, notamment dans les milieux politiques. Cette sortie jugée méprisante a ravivé un sentiment d’humiliation face à l’attitude condescendante de la France envers Haïti.

Pourtant, malgré cette insulte publique, le coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), Lesly Voltaire, s’est rendu à Paris pour une rencontre à l’Élysée. Une visite qui n’a pas fait l’unanimité, certains estimant qu’elle aurait dû être conditionnée à des excuses officielles du président français.

La mission de Lesly Voltaire en France, bien que présentée comme une démarche diplomatique nécessaire, passe mal auprès d’une partie de la population haïtienne. L’absence de réaction forte du CPT face aux propos de Macron renforce l’impression que les dirigeants haïtiens acceptent d’être traités avec mépris sans imposer de respect en retour.

Ce n’est pas la première fois que la France affiche une attitude condescendante envers Haïti. De la rançon de l’indépendance à l’ingérence diplomatique, les relations franco-haïtiennes ont toujours été marquées par un déséquilibre de pouvoir. L’insulte de Macron s’inscrit dans cette continuité et aurait mérité une réponse plus ferme.

Plutôt que de passer sous silence ces propos, le CPT aurait pu utiliser cette rencontre pour exiger le respect dû à la nation haïtienne. Cette absence de fermeté affaiblit la position d’Haïti sur la scène internationale et donne l’impression que ses dirigeants sont prêts à tout accepter au nom de la diplomatie.

En fin de compte, cette visite souligne un dilemme persistant : comment coopérer avec les grandes puissances sans compromettre la dignité nationale ? Pour beaucoup, le fait que Lesly Voltaire se rende à l’Élysée sans obtenir d’excuses préalables donne un sens amer aux paroles de Macron, comme si elles avaient trouvé un écho dans l’attitude même des dirigeants haïtiens.

Joël AGOUDOU