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Fête du Drapeau au Cap-Haïtien : rejet populaire, gaspillage d’État et humiliation nationale

Cap-Haïtien, 18 mai 2025 – Ce qui devait symboliser l’unité nationale s’est transformé en un spectacle de rejet et d’indignation populaire. La 222e Fête du Drapeau, organisée cette année au Cap-Haïtien, a été marquée par une forte contestation citoyenne, une mise en scène gouvernementale ostentatoire et des dépenses jugées scandaleuses. Résultat : une célébration décriée, largement boycottée par les Capois.



La cérémonie a débuté dès 8h du matin par la montée du drapeau sur la Place d’Armes (rue 20), en présence du coordonnateur du Conseil présidentiel de transition (CPT), Fritz Alphonse Jean, du Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, du ministre de l’Éducation nationale Antoine AUGUSTIN, ainsi que de plusieurs autres officiels. La délégation s’est ensuite rendue à la cathédrale pour assister à une messe symbolique, avant de rejoindre la mairie où était installé le podium officiel.


Au cours de la cérémonie, les discours se sont succédé : ceux du coordonnateur du CPT, du ministre de l’Éducation Antoine AUGUSTIN, et du recteur de l’Université d’État d’Haïti, Dr Dieuseul PREDELUS. Mais pendant ce temps, la colère montait dans la foule. De la cathédrale à la mairie, la population criait sa frustration : « CPT se vòlè », pouvait-on entendre. En signe de rejet, de nombreux citoyens ont même refusé le repas communautaire offert par les autorités.


Plusieurs écoles, dont l’Institution Sacré-Cœur, ont tout de même participé à la parade, offrant une touche de couleur à un événement globalement terni par la défiance populaire.


Mais ce sont surtout les dépenses exagérées qui ont suscité l’indignation. D’après des sources concordantes, plus de 300 millions de gourdes ont été dépensés pour cette mise en scène. Véhicules de luxe loués à prix fort pour les VIP, leurs gardes du corps et leurs proches ; chambres d’hôtel somptueuses, souvent réservées mais non occupées ; repas coûteux payés pour des réunions annulées. Pire encore : plusieurs VIP étaient accompagnés de leurs conjointes ou de jeunes femmes surnommées boubout, elles aussi prises en charge par l’État, sans aucune fonction officielle.


La résidence de Fritz Alphonse Jean, située à la rue 19, a été placée sous haute sécurité avec au moins cinq véhicules de police déployés en permanence. Des agents ont été rémunérés généreusement, sans transparence sur leurs réelles missions. Loin d’une démonstration d’unité, l’événement a davantage ressemblé à un week-end de luxe financé par les fonds publics.


Un incident choquant s’est également produit à l’intérieur même de la cathédrale : le professeur de littérature connu sous le surnom de Mèt Kraze, militant actif pour les droits des enseignants, a été giflé par un agent de la Politour. Le professeur a immédiatement répliqué. Il était accompagné d’une vingtaine de collègues venus réclamer une augmentation de salaire, leur nomination dans le système et la livraison des cartes de débit promises.


À noter que la plupart des responsables ont déjà quitté le Cap-Haïtien, y compris le ministre de l’Éducation Antoine AUGUSTIN. Il reste à confirmer si le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, encore présent ce dimanche dans la ville, prendra également le chemin de retour vers Port-au-Prince dans l’après-midi.


Cette Fête du Drapeau restera gravée dans les mémoires, non pas comme une page d’histoire nationale honorée, mais comme une démonstration flagrante de la fracture entre un pouvoir déconnecté et un peuple révolté. Une insulte à la souffrance quotidienne des Haïtiens, à l’image d’un État qui, au lieu de rassembler, creuse chaque jour un peu plus le fossé de la méfiance.

 
 
 

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